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BLOOM protége les écosystèmes marins

    

BLOOM est une association loi 1901 à but non lucratif créée en 2005 par Claire Nouvian. Elle est composée d'une équipe petite mais costaud composée de 10 personnes — dont cinq chercheurs — soutenue par un Conseil d’administration précieux.
Son efficacité est aujourd'hui reconnue, grâce à la confiance, aux encouragements et à la mobilisation des citoyens, des donateurs, des fondations, des scientifiques et de certains élus. Des succès et un impact fort lui permettent de relever les défis qui nous attendent pour la préservation de l’océan.
    
Contrairement à ce que laisse croire l’impact de nos actions, nous fonctionnons avec un budget très limité, que nous consacrons entièrement à nos programmes et nos travaux de recherche. Notre notoriété s’est établie sur la base de notre efficacité et nos soutiens financiers se font grâce au bouche à oreille et à la mobilisation des réseaux. Cela nous permet de vous garantir que 100% des dons sont alloués à nos actions.
    
    La mission de BLOOM est de protéger les écosystèmes marins et de préserver leur résilience face aux changements climatiques, tout en maximisant les emplois durables dans la pêche et l’aquaculture. Ces écosystèmes et emplois sont menacés par le modèle existant de la pêche, qui privilégie avant tout les intérêts industriels, trop efficaces et destructeurs, au détriment des pêcheurs artisans qui représentent pourtant 85% des unités de pêche en Europe. La mission de BLOOM est également de mettre fin aux méthodes de pêche destructrices — par exemple le chalutage profond et la pêche électrique — et à l’expansion de la pression de pêche dans le monde en favorisant la pêche artisanale qui utilise des méthodes plus douces pour l'environnement.
    
    En agissant sur les causes et non sur les symptômes ou les conséquences, l'association BLOOM recherche un impact systémique de nature à changer les causes structurelles des problèmes du secteur de la pêche. Dans ce but, l'équipe de BLOOM déploie un programme de recherche scientifique stratégique et indépendant, ensuite décliné en actions de sensibilisation, d'éducation et de médiation scientifique auprès du grand public et des décideurs politiques. En lançant l'alerte et en assumant son rôle de contre-pouvoir pour un exercice équilibré de la démocratie, BLOOM donne une voix à ceux qui n’en ont pas et reste persévérante en toutes circonstances.


 

Des tendances inquiétantes

Dans son rapport de 2018, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) rapportait que plus d'un tiers des stocks de poissons était surpêché au niveau mondial et que 60 autres pourcents ne pouvaient pas supporter une pression de pêche plus importante (1). En Europe, le problème est encore plus prégnant : selon les dernières données disponibles, 69 % des stocks de l’Union européenne continuent d'être soumis à une pression de pêche trop forte ne permettant pas de maximiser les captures année après année (rendement maximal durable, ou RMD, qui constitue le pilier central de la Politique commune de la pêche) (2). La mer Méditerranée est la zone de l’Union européenne la plus surexploitée, avec presque 90 % des stocks actuellement surpêchés. (3)

L’impact de cette surpêche — souvent effectuée grâce à l'argent du contribuable et à échelle industrielle avec des méthodes de pêche beaucoup trop efficaces et destructrices — ne se limite pas à la diminution de la taille des populations de poissons : certains engins de pêche tels que les chaluts profonds et les chaluts électriques ont un terrible effet sur la biodiversité marine, la structure des habitats, mais aussi sur les communautés côtières qui dépendent de cette biodiversité.

Le réveil est amer : les pays industrialisés ont dû étendre leurs activités vers le large et les profondeurs (4); des accords de pêche ont vu le jour pour accéder aux zones exclusives économiques des pays en voies de développement (5); méduses, algues et bactéries remplacent progressivement les poissons dans les écosystèmes (6); des méthodes toujours plus efficaces voient le jour pour maximiser le profit à court terme face à une ressource en voie d'épuisement. Ce sont aussi de nombreux « services écosystémiques » gratuits qui sont perdus :

·    Une nourriture abondante ;
·    L’absorption du CO2 (relâché dans l’atmosphère par la combustion des énergies fossiles, mais absorbé par diffusion et photosynthèse au niveau des océans) et la régulation du climat mondial (voir « L'océan : régulateur du climat terrestre ») ;
·    L’incroyable réservoir d’espèces et de molécules (patrimoine culturel, potentiel médical et technologique) ;
·    Une source de stabilité alimentaire, économique et politique pour des zones exsangues (comme la Corne de l’Afrique) et les pays en voie de développement.

Cette surexploitation des ressources entraîne une perte d’emplois, le délitement du tissu social le long du littoral, et une iniquité croissante dans la répartition des captures et de la consommation des produits de la mer dans le monde. C’est donc une catastrophe écologique, socio-économique et sanitaire qui se profile. Nos programmes de recherche et campagnes de plaidoyer visent à inverser ces tendances, notamment en luttant contre les méthodes de pêche destructrices (voir « Des campagnes européennes victorieuses ») et les subventions publiques qui leur permettent de continuer d'opérer (voir « Lutter contre les subventions néfastes : la mère de toutes les batailles »).

Lutter contre les subventions néfastes : la mère de toutes les batailles

Certains types de subventions — c'est-à-dire les paiements financiers, directs ou indirects, d'une entité publique au secteur de la pêche — contribuent à la surcapacité de pêche : elles incitent à la mise en œuvre de trop de technologie et d'efforts déployés pour capturer des stocks de poissons limités et entraînent donc directement la surpêche. Ces subventions sont connues sous le nom de « subventions néfastes ». Elles représentent plus de 60 % des subventions mondiales à la pêche, soit environ 20 milliards d'euros par an (7). Elles comprennent toute subvention qui réduit les coûts opérationnels du secteur de la pêche, comme la construction de nouveaux navires ou l'augmentation de l'efficacité des engins de pêche. Il peut également s'agir de subventions accordées à des entreprises et à des navires de pêche qui se livrent à des mauvaises pratiques telles que la dégradation de l'habitat marin, l'esclavage ou la capture d’une grande proportion d'espèces non destinées à la vente (ce que l'on appelle les « captures accessoires ») ou d’espèces menacées. Mais toutes les subventions ne sont pas « néfastes ». Au contraire, certaines subventions conduisent à des investissements dans le capital naturel et sont donc bénéfiques pour la société dans son ensemble. Contrairement aux subventions « néfastes », ces subventions « positives » garantissent la préservation des écosystèmes marins et la protection des pêcheurs artisans qui en dépendent. Il s'agit, par exemple, de subventions visant à améliorer les programmes de suivi scientifique, de contrôle et de surveillance des navires de pêche, la recherche halieutique et les programmes de restauration des habitats.

Pour BLOOM, il ne pourra pas y avoir de pêche réellement durable tant que les finances publiques seront au service de l'hyper-efficacité et de la destructivité de la pêche industrielle. Pour préserver les écosystèmes marins et les pêcheurs artisans qui en dépendent, nous devons donc arrêter de subventionner les méthodes de pêche trop efficaces et destructrices. Depuis toujours, cette question des subventions publiques est au cœur des actions de BLOOM. Par exemple, lors de notre campagne européenne pour l'interdiction du chalutage profond, l'un de nos arguments majeurs a été de démontrer — comptes certifiés à l'appui — que la flotte de pêche d'Intermarché, la Scapêche (principal acteur de la pêche profonde en Europe), était chroniquement déficitaire malgré des millions d'euros de subventions publiques accordées année après année (8). Lors de notre campagne pour l'interdiction de la pêche électrique, nous avons de la même manière démontré que le développement et l'expansion de cette méthode de pêche destructrice avait été possible grâce à l'octroi de plus de 21 millions d'euros d'argent public (9).

Ce schéma se répète à l'envie. Un groupe international de chercheurs a même démontré que sans le concours de subventions publiques, la moitié des activités de pêche industrielle se déroulant en haute mer ferait banqueroute (10). Couper le robinet des subventions publiques, c'est donc arrêter, mécaniquement, les pêches destructrices.

Depuis 2015, BLOOM a développé un programme de recherche unique visant à faire la transparence sur l'allocation des subventions publiques au secteur de la pêche européen. Nous sommes persuadés que la transparence produit à elle seule plus de résultats que de nombreux discours d'affichage. Parce qu'une fois publiées et accessibles à tous, les données ne laissent aucune place à de fausses déclarations, nous forçons les gouvernements et les administrations à publier ces données. Quand cela ne fonctionne pas, comme par exemple en France, nous attaquons les États en justice (11).

En parallèle de ce programme de recherche dont les résultats seront bientôt rendus publics, nous agissons également au niveau européen dans le cadre du futur Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), qui allouera plus de six milliards d'euros au secteur de la pêche entre 2021 et 2027 (12). Ce fonds est donc d’une importance capitale, qui dépasse de loin la seule problématique de la bonne administration de l’argent public. L’enjeu de notre campagne est majeur : empêcher notamment la réintroduction des aides à la construction de nouveaux navires, interdites depuis 2004 en Europe. Si l’Union européenne venait à réintroduire de telles aides, elle bafouerait au grand jour ses engagements internationaux, notamment dans le cadre des Objectifs de développement durable (ODD), adoptés en septembre 2015 par l’Assemblée générale des Nations unies.

Des campagnes européennes victorieuses

Deux campagnes européennes ont marqué l'histoire de BLOOM et permis des changements législatifs majeurs au niveau européen : la campagne pour l'interdiction de la pêche profonde et celle pour l'interdiction de la pêche électrique. Nous vous proposons ici deux résumés visuels de ces campagnes, mais plus d'informations sont disponibles sur notre site internet à www.bloomassociation.org.

L’océan : régulateur du climat terrestre

L’océan représente 71% de la surface de la planète et près de 98% de son volume habitable. Il contient 96,5% de l’eau présente sur Terre (13) et produit la moitié de l’oxygène que nous respirons (14). Sa bonne santé est donc primordiale pour notre bien-être, d’autant plus que des centaines de millions de personnes en dépendent directement pour leur travail ou leur alimentation ! (15,16)

Mais nous nous trouvons à un point de bascule de notre civilisation. Nous avons compris que nos activités modifiaient en profondeur les équilibres naturels de notre planète et que les énergies renouvelables à elles seules ne suffiraient pas à limiter les bouleversements climatiques. Une refonte de nos modes de production et de consommation est devenue nécessaire, ainsi qu’un changement de notre modèle de pensée pour apprendre à valoriser et protéger la nature, tant sur terre qu’en mer, car les écosystèmes rendent d’indispensables services économiques et climatiques sans lesquels nous ne pourrons pas inverser la sombre tendance actuelle. Si rien n’est fait pour décarboner massivement nos économies, les scientifiques du groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) prévoient une augmentation de 2 à 6 degrés de la température à horizon 2100 (17), ce qui affectera de manière irrémédiable les équilibres planétaires.

L'océan est au cœur de ces enjeux. Saviez-vous par exemple que la taille des poissons devrait réduire de 20 à 30% sous l’effet du réchauffement de l’océan ? En cause, un besoin non satisfait en oxygène. C’est le triste constat d’une nouvelle étude parue en 2017 dans une revue scientifique internationale, venant consolider des résultats antérieurs déjà alarmants(18).

En raison du réchauffement de l'eau, les poissons vont également migrer en masse pour trouver la température qui leur convient. Les scientifiques prévoient ainsi une diminution de 40% des captures de poisson autour de l’équateur. Ainsi, l'impact de ces migrations de poisson sera le plus fort pour des pays en voie de développement dont l’économie et la sécurité alimentaire reposent en grande partie sur la pêche (19). Pour beaucoup de ces pays, le tourisme représente aussi une industrie importante, reposant sur la plongée et le snorkeling (plongée avec tuba) comme attraction majeure. Ironiquement, les captures augmenteront de 30 à 70% aux hautes latitudes, c’est-à-dire là où les pays sont les plus riches (ceux qui ont très majoritairement causé le réchauffement climatique) ! (20)

Pour aller plus loin, nous avons écrit un « petit guide pour éviter de dire de grosses bêtises », bourré de références scientifiques, qui vous permettra de vous faire une culture océan/climat en béton et en un temps record. Rendez-vous sur notre site internet : www.bloomassociation.org/wp-content/uploads/2018/10/bloom-petit-guide-climat.pdf.

Une consommation responsable est-elle possible ?

Face aux tendances et mécanismes mis en évidence ici, voilà une question simple mais dont la réponse est malheureusement complexe. Si vous vous posez la question, c'est que vous savez peut-être déjà que, comme pour de nombreux autres secteurs, les labels vantant une pêche « durable » ou « responsable » sont devenus de véritables arguments marketing sans ancrage dans la réalité. Si vous ne le savez pas encore, c'est malheureusement la triste réalité : plutôt que de récompenser les pêcheries les plus vertueuses, le label MSC — de très loin le plus disponible sur les étals des poissonniers — certifie de nombreuses pêcheries destructrices et contribuant à la surpêche mondiale. En réalité, ce label est surtout une excuse pour la grande distribution, dont le modèle repose principalement sur un approvisionnement en poissons pêchés de manière industrielle : espèces et volumes constants toute l'année. Pas étonnant, donc, de voir de grandes enseignes telles que Carrefour se réfugier derrière la facilité de ce label, tout en clamant que leur poissonnerie est « durable » malgré les alertes lancées de plus en plus fréquemment par les associations et les scientifiques.

Exit les labels, donc. Si vous souhaitez consommer du poisson, il y a deux règles en or pour minimiser son impact sur les écosystèmes marins :

1)    Choisissez du poisson qui a été pêché avec des méthodes à faible impact, comme par exemple la ligne, le filet, ou le casier. Évitez le poisson qui a été pêché au chalut ou à la drague, car ces engins de pêche ont un impact colossal sur les habitats marins — y compris les éponges et coraux froids que l'on trouve dans les canyons profonds — et capturent aussi beaucoup de poissons non voulus et donc rejetés morts à la mer. Pour vous aider dans ce choix, nous avons réalisé une infographie : www.bloomassociation.org/nos-actions/nos-themes/mieux-consommer/. Si la méthode de pêche n'est pas inscrite sur l'étiquette par votre poissonnier, c'est illégal. Faites-lui savoir !
2)    Variez les poissons que vous consommez. Abandonnez le trio saumon-cabillaud-crevette et n'ayez pas peur d'acheter du tacaud, du lieu jaune, du merlan bleu ou de la vieille. Ce faisant, vous favoriserez la pêche artisanale et de proximité (saumons, cabillauds et crevettes sont tous importés, parfois du bout du monde).

Une troisième règle vaut pour toutes les protéines animales : réduisez leur consommation. Un régime plus végétal ne peut être que bénéfique pour votre santé et celle de notre planète.

 

l'équipe de BLOOM

 

 

(1) FAO (2018) La situation mondiale des pêches et de l’aquaculture — Atteindre les Objectifs de développement durable. Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture.

(2) Froese et al. (2018) Status and rebuilding of European fisheries, Marine Policy.

 (3)CSTEP (2019) Comité scientifique, technique et économique de la pêche - 60e réunion plénière (PLEN-19-01).

 (4)Swartz et al. (2010) The spatial expansion and ecological footprint of fisheries (1950 to present). PLOS ONE.

 (5)Le Manach et al. (2013) European Union’s public fishing access agreements in developing countries. PLOS ONE.

 (6) Voir par exemple le cas de la Mer Noire : Bănaru et al. (2010) Man induced change in community control in the north-western Black Sea: the top-down bottom-up balance. Marine Environmental Research.

 (7) Sumaila et al. (2019) Updated estimates and analysis of global fisheries subsidies. Marine Policy.

(8) Voir notre analyse : www.bloomassociation.org/analyse-des-comptes-de-la-scapeche/.

(9)Voir notre étude : www.bloomassociation.org/publication-peche-electrique-feamp/.

(10)Sala et al. (2018) The economics of fishing the high seas. Science Advances.
 (11)Lire notre communiqué de presse : www.bloomassociation.org/subventions-bloom-attaque-letat/
(12) Lire notre plaidoyer : www.bloomassociation.org/wpcontent/uploads/2019/10/Plaidoyer_FEAMP_FR_mail.pdf

 (13)Shiklomanov (1993) World fresh water resources.

 (14) Maribus (2010) World ocean review-Living with the ocean.

(15)Teh and Sumaila (2013) Contribution of marine fisheries to worldwide employment. Fish and Fisheries.

(16)FAO (2014) La situation mondiale des pêches et de l’aquaculture - Possibilités et défis.

 (17)GIEC (2014) Changements climatiques 2014 - Incidences, adaptation et vulnérabilité - Résumé à l’intention des décideurs.

 (18) Pauly and Cheung (2017) Sound physiological knowledge and principles in modeling shrinking of fishes under climate change. Global Change biology.

 (19)Allison et al. (2009) vulnerability of national economies to the impacts of climate change on fisheries. Fish and Fisheries.

 (20)Cheung et al. (2010) Large-scale redistribution of maximum fisheries catch potential in the global ocean under climate change. Global Change Biology.

 

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